JULIEN WOLFS – clavecin
Méditation
Johann Jacob Froberger

Avec « Méditation », Julien Wolfs met l’accent sur des pièces majeures inspirées d’épisodes sombres de l’existence de Froberger.
FLORA4016 │UVM distribution │ Sortie le 20 octobre 2017

S’il est un musicien trop souvent méconnu, c’est bien Froberger.

Pourtant, ses seules dates doivent susciter la curiosité du mélomane. Qu’on y songe: sa vie créatrice court de 1640 à 1667. Soit entre les morts du grand Monterverdi et de Frescobaldi (le maître de Froberger à Rome), tous deux disparus en 1643; et la glorieuse année 1685, qui vit naître JS Bach, GF Haendel et D.Scarlatti.

Une période où toutes les audaces harmoniques et rythmiques étaient permises, encouragées, célébrées !

Pour un peu, on penserait ( toute mesure gardée !) à la phrase de Flaubert, placée par M.Yourcenar en exergue  de ses Mémoires d’Hadrien: « les dieux n’étant plus et le Christ n’étant pas encore, il y a eu de Cicéron à Marc-Aurèle un moment unique où l’homme seul a été ».

L’homme Froberger, justement, parlons-en. Sa vie itinérante nous rappelle combien furent féconds les échanges musicaux (et bien sûr picturaux) entre Italie, Allemagne, France, Angleterre, des 17 et 18 siècles. Et il n’hésite pas à composer sur des évènements personnels ou douloureux. Ainsi, la mort dans ses bras de son ami Blanrocher nous vaut des pages poignantes avec, dans les dernières mesures, une note grave répétée, telle un glas. Le tout avec une économie de moyens dans la composition qui impressionne, tant les émotions sont richement rendues.

Ailleurs dans le disque, on pense à l’Italie baroque (Tocatta II), à la mesure française (Fantasia VI) ou au contrepoint allemand – le Cantor tiendra d’ailleurs Froberger en haute estime (Capricio X).

Le clavecin Ruckert de J.Wolfs rend magnifiquement justice à la richesse d’inspiration et à la variété de tons de ces pages. Le son n’est ni clinquant, ni hiératique. Le jeu de l’interprète marie avec bonheur la fantaisie indispensable à cette musique et une élégance de bon aloi.

Dernier point: c’est toujours un régal (surtout pour un pianiste) d’entendre les frottements harmoniques dûs à l’accord en tempérament inégal des instruments de cette époque.